top of page

Âgé de 2 ans à peine, les miracles de Jésus. 2.

martinesadion2

pendant la Fuite en Égypte.


Au XIVe siècle, les miracles du palmier et du baumier




Coll. Musée Correr, Venise.
Coll. Musée Correr, Venise.

Exposée au Musée Correr à Venise, cette peinture a tempera sur bois d’un artiste vénitien inconnu, probablement reconstituée pour être exposée, date du tout début du XIVe siècle.

L’iconographie en est complexe avec, sur le panneau de gauche, un arbre de Jessé présentant la généalogie du Christ puis, sur celui du centre, une Passion et une Vierge à l’enfant entourée de saints et d’apôtres. Les trois petits panneaux carrés de droite reprennent plusieurs épisodes de l’Ancien et du Nouveau Testament : le sacrifice d’Isaac, le Buisson ardent, Jésus « bon pasteur » ou l’Assomption de la Vierge entourée des douze apôtres.




Quant au petit panneau central, il est consacré à la Fuite en Égypte de la Sainte Famille.   

Dans un décor de montagne boisée, Marie est représentée à deux reprises vêtue de la même robe rose et d’un manteau bleu décoré de croix dorées. Chacune de ses figures illustre un des miracles de Jésus lors du voyage.



A gauche, elle est debout et tend les bras vers les branches d’un palmier.

Selon l’Évangile du Pseudo-Matthieu[1], Jésus a deux ans lorsque la Sainte-Famille entreprend le voyage vers l’Égypte. Au troisième jour, Marie, fatiguée par la chaleur du désert, affamée et assoiffée, se repose à l’ombre d’un palmier. Voyant les fruits de l’arbre, Jésus s’adresse ainsi au palmier :« Arbre, incline-toi et nourris ma mère », puis « ouvre de tes racines la source qui est cachée sous terre ». L’arbre s’incline pour donner ses dattes, une source jaillit et la famille peut se désaltérer et se rassasier. Puis « Ils partirent le lendemain. Au moment où ils se mettaient en route, Jésus se tournant vers le palmier dit : « Je t’accorde ce privilège, palmier, qu’un de tes rameaux soit transporté par mes anges et planté dans le paradis de mon père. Et voici ma bénédiction : à qui aura vaincu dans une lutte quelconque on dira : « Tu as obtenu la palme. »   

C’est ainsi que la palme sera désormais et encore aujourd’hui le symbole de la victoire, portée par tous ceux qui ont triomphé. De là, nos palmes académiques, la palme des saints martyrs, remporter la palme d’or etc… !

Aux pieds de Marie debout, Joseph assis tient dans ses bras l’enfant Jésus emmailloté. Tous deux la regardent. Cette représentation d’une figure paternelle tendre à qui l’enfant est confié et d’une mère pourvoyant à la nourriture du foyer est rare. Elle sera peu reprise dans les représentations postérieures où l’enfant sera le plus souvent dans les bras de sa mère[2].

La deuxième figure de Marie agenouillée semble tenir un tissu qu’elle presse entre ses mains. Il s’agit probablement de l’illustration d’un miracle moins connu dit « du baumier ». 

L’Évangile de l’Enfance[3] parle succinctement de ce miracle : arrivés près du Caire, « à Matarieh, le Seigneur Jésus fît naître une source où sainte Marie lui lava sa tunique. Et la sueur du Seigneur Jésus qu’elle égoutta à cet endroit y fit naître le baume ». Le baumier (ou balsamier) est un arbuste dont l’écorce sécrète une résine, sous formes de gouttes jaune orangé. Récoltées, elles donnent le baume, onguent parfumé « à l’odeur de sainteté »[4] et aux vertus médicinales, dont on pensait qu’il avait aussi des pouvoirs miraculeux.  

 

Faire pencher un palmier obéissant pour nourrir sa famille - miracle très populaire chez les peintres au fil des siècles- ou faire naître une source et un arbre de sa sueur, les pouvoirs de cet enfant de deux ans étaient déjà « immenses » … On peut en sourire aujourd’hui mais il faut constater, qu’apparemment, ces évidentes inventions n’ont pas empêché les fidèles de les croire et les peintres de les illustrer. Pendant longtemps.

 


[1] Évangiles apocryphes. I. Protévangile de Jacques, Pseudo-Matthieu, Évangile de Thomas, textes annotés et traduits par Charles Michel. Histoire de Joseph le Charpentier, rédactions copte et arabe traduites et annotées par P. Peeters. Consulté sur https://archive.org/details/EvangilesApocryphesPeeters1/page/116/mode/2up.

[2] Dans la série de 27 gravures des Idées pittoresques sur la Fuite en Égypte de G.D. Tiepolo, seule la planche 12 montre l’enfant porté par Joseph.

[3] Évangiles apocryphes, t. II, l’Évangile de l’enfance, rédactions syriaques, arabes et arméniennes, P. Peeters (éd.) ; Paris, Picard, 1914.

[4] Jean-Louis Benoît, Autour de l’odeur de sainteté […] ; IRIS 33/ 2012.

3 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

Comentários


Post: Blog2_Post
bottom of page